Smals : Cela fait environ quatre ans que Smals, à la demande de l’INAMI, a mis en place le projet VIDIS, le Virtual Integrated Drug Information System, destiné à améliorer l’ensemble des processus et données liés au traitement médicamenteux des patients en Belgique. Nicolas Rogge, Chain Service Manager en charge de la santé au niveau fédéral et Pierre-Jean Dogné, chef de projet pour VIDIS chez Smals, nous avons appris que, pour le projet VIDIS, vous avez développé un proof of concept relatif à l’IA.

De quoi s’agit-il exactement et comment s’est déroulé ce parcours ?

Nicolas : Oui en effet ! Nous avons développé à la fois une application web et une application mobile pour « Mes Médicaments ». Comme tous les citoyens belges sont concernés, la base d’utilisateurs est vaste. Au fur et à mesure que le projet avançait, sa portée s’est considérablement élargie. Il ne s’agissait plus seulement des prescriptions et des schémas de médication, mais aussi des médicaments délivrés ainsi que des données personnelles des utilisateurs et de leurs mandants.

Smals : Pouvez-vous expliquer comment cette expansion a conduit à la nécessité d’un support aux utilisateurs finaux ?

Pierre-Jean : Certainement ! La croissance de l’utilisation de nos applications (nous avons aujourd’hui plus de 250.000 utilisateurs de l’application mobile !) a entraîné parallèlement une augmentation du besoin de support aux utilisateurs finaux. En effet, les agents de première ligne recevaient de plus en plus de questions sur des sujets tels que l’authentification via itsme®, la consultation des prescriptions des partenaires et les problèmes techniques tels que les erreurs à l’ouverture des prescriptions. Toutes ces questions aboutissaient chez les agents de première ligne, augmentant considérablement la pression.

Smals : Comment avez-vous remédié à cela ?

Nicolas : Nous y avons vu une occasion de développer un assistant de première ligne basé sur l’IA. Ce système autorisera des échanges directs avec les utilisateurs finaux sous la forme de questions et réponses, laissant aux agents de première ligne plus de temps pour se concentrer sur des questions spécifiques qui requièrent un contact personnel. Le chatbot procure un service qui est en outre disponible 24/7. Il a été formé en néérlandais et en français et peut donc assurer un support dans ces deux langues.

Smals : Bert Vanhalst de l’équipe Smals Research, vous avez programmé le chatbot – comment fonctionne-t-il exactement ?

Bert : Lorsqu’un utilisateur final pose une question, telle que « comment puis-je consulter les données de mon partenaire ? », le chatbot génère une réponse complète basée sur des sources pertinentes qui lui ont été référencées. Grâce à une combinaison de mots-clés et de recherches sémantiques, le chatbot recherche d’abord les éléments d’information pertinents dans sa base de connaissances, qu’il classe ensuite en fonction de la requête. Une fois que ces chunks, c.-à-d. les éléments d’information, ont été placés dans un context, tout est prêt pour générer une réponse, au moyen d’un modèle de language, mais là cela devient un peu compliqué à expliquer en termes simples.

Smals : Comment le chatbot a-t-il été développé ?

Bert : Le développement a été réalisé en collaboration avec l’équipe Smals Research. Nous avons publié les chatbots sur notre infrastructure de laboratoire sécurisée afin qu’ils ne soient pas accessibles à n’importe qui. Pour l’architecture, nous avons utilisé l’architecture RAG, Retrieval Augmented Generation, vu qu’il s’agit d’un système de questions-réponses. Il faut savoir que l’élément fondamental d’un chatbot est l’information utilisée pour  le guider, afin de réduire le risque d’hallucinations. Nous nous sommes dès lors appuyés sur les informations des agents de première ligne eux-mêmes et sur un aperçu de toutes les questions et réponses qu’ils ont traitées précédemment dans la vie réelle. Et nous y avons ajouté des informations issues de 34 sites web sur lesquels nous recevons souvent des questions.

Smals : Quelles technologies ont été appliquées dans ce cadre ?

Bert : Nous avons utilisé Python Langchain et OpenAI  gpt-4o. Pour le module d’embedding, nous avons utilisé OpenAI text-embedding-3-large. En arrière-plan, Chroma est utilisé pour le stockage des documents, la recherche, le filtrage des métadonnées, les recherches vectorielles, etc. Pratiquement toutes des technologies open source, bien sûr.

Smals: Les soins de santé restent évidemment une question très sensible, surtout si l’on fait appel à l’IA. Des précautions particulières ont-elles été prises ? 

Pierre-Jean : Tout à fait, les règles doivent être respectées et certaines limites ne doivent absolument pas être franchies. Le chatbot a dû être entraîné en ce sens.  

Même s’il est capable, grâce à son énorme base de connaissances, de répondre à des questions comme « J’ai mal à la tête, que me conseillez-vous ? », les règles que nous avons mises en place lui feront répondre de prendre plutôt contact avec un spécialiste de la santé.

Smals : Quels sont les principaux enseignements que vous avez tirés de ce projet ?

Nicolas : Il reste important de formuler des objectifs clairs avec le client et de définir les KPI correspondants, car c’est sur cette base que l’on mesurera l’impact du chatbot dans une phase ultérieure. Parallèlement, la qualité de la base de connaissances demeure cruciale ; les réponses moins qualitatives sont souvent liées à des informations dupliquées ou inexactes (obsolètes) dans la base de connaissances, par exemple parce que les informations présentes sur un site web ont été modifiées entre-temps. En tout état de cause, cela restera un point d’attention majeur !

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